Ce week-end de Pentecôte 2022 fut particulièrement agité sur la France. La convergence des différents vents, concordant avec une géographie favorable donnèrent des conditions particulièrement orageuses notamment sur le Nord du Massif-Central où de lourds dégâts ont été observés.
Le 2 juin, je décide de partir pour un périple de quelques jours en direction du Massif-Central, où les conditions s'annoncent particulièrement chaotiques. Ma destination du jour se trouve proche de Yssingeaux, en Haute-Loire. En effet, les vents se concordent avec une instabilité particulièrement forte, ce qui permet de facilement trouver la zone la plus orageuse du jour.
A Monistrol-sur-Loire, je trouve un joli point de vue qui permet d'observer tranquillement le développement de la cellule orageuse du jour.
Rapidement, les premiers bourgeonnement nuageux se transforment en une vaste enclume qui couvre rapidement le ciel. Cependant, la convection est plutôt molle et à plusieurs moments, j'avais l'impression que l'orage allait s'étouffer dans son panache et se dissiper.
Cependant, les images radar montrent l'inverse avec un noyau devenant de plus en plus intense. J'en déduis donc que la tourelle convective est à l'ombre, sont ses couleurs sont confondues avec celles de l'enclume du cumulonimbus.
En s'approchant de Monistrol-sur-Loire et du pays stéphanois, l'ensemble de l'organisation de la cellule est de plus en plus claire, avec une base nuageuse qui se dévoile petit à petit à l'arrière du rideau. Je me rends compte rapidement que la base était mésocyclonique et que j'avais affaire à un orage aux caractères supercellulaires.
L'activité électrique se manifeste sous forme d'éclairs inter-nuageux, typique des orages dynamiques français. Cet orage traverse rapidement le pays stéphanois et je la laisse passer. Dessous, des grêlons de 4 centimètres de diamètres ont été observés. De mon côté, je pars plus au Nord, où une cellule orageuse se forme sur le Cantal, en espérant qu'elle ne meurt pas sur sa route. Je me positionne au niveau de Feurs.
En s'approchant de ma position, sous l'enclume, un petit noyau orageux commence par surprise à bombarder d'impacts de foudre. Malheureusement, je suis très mal positionné car entouré de forêts et de pylônes électriques et une absence totale de lumière pour effectuer une quelconque mise au point. De plus, l'orage est un peu loin. J'ai tout de même tenté de capturer quelques spécimens, avec beaucoup de mal et une petite déception.
La virulente cellule orageuse aura traversé Issoire avant de s'affaisser. Cependant, en début de nuit, un nouvel orage, cette fois-ci, plutôt linéaire à tendance rétrograde se forme sur le Limousin et tend à se diriger vers la plaine de la Limagne. Je décide de tenter ma dernière chance de la soirée avant de dormir. Je vais donc en direction de Combronde pour tenter l'ultime interception de la journée.
Arrivé sur place, l'orage est toujours en cours mais l'activité électrique est plutôt décevante en raison d'un sillage turbulent particulièrement coriace qui limite une bonne visibilité des impacts de foudre, qui tombent souvent sous les précipitations.
Sous les grondement du tonnerre, je finis par m'endormir sur place dans ma voiture, en pensant à la journée du lendemain qui m'attend.
Au petit matin, à 6 heures, le tonnerre gronde. Un orage à base élevée traverse la plaine de la Limagne. Le ciel est souvent gris et ma motivation pour capturer un quelconque éclair est nulle. Je continue de me reposer tranquillement, au son des grosses gouttes qui tapent le toit de mon auto. Quelques heures plus tard, je consulte les modèles météorologiques du jour qui ne sont pas très clairs. Deux zones sont concernés pour la journée : la Haute-Loire et la vallée de l'Allier. Je prends l'option de la Haute-Loire... dans un premier temps. Dans l'après-midi, alors que je suis sur Thiers pour traverser le massif du Forez pour prendre la direction du pays stéphanois et la Haute-Loire, je constate que les conditions sont assez molles. En revanche, de virulentes cellules se forment depuis l'Aubrac et tendent à remonter en direction de la vallée de l'Allier. Je bifurque donc direction Sud-Ouest, vers le Puy d'Ysson.
Sur le point de vue panoramique, j'observe de belles cellules isolées qui foudroient la "Toscane auvergnate".
Après cette sympathique séance, la situation dégénère sous la convergence au Sud-Ouest où les cellules orageuses se renforcent et deviennent grêligènes. Une d'entre elles passe à mon Ouest, tout en se structurant.
Je prends la direction de Clermont-Ferrand en essayant de la rattraper. Malheureusement, elle est trop rapide et je me fais emprisonner par son averse grêligène. Les couleurs sont radieuses, la structure est à sa maturité, mais impossible de s'arrêter. Je file tout droit en direction de l'Allier, près d'Ebreuil, mais la nuit tombe et la structure s'aplatit, en formant un arcus. Sur le coup, je suis un peu déçu d'avoir loupé le pic d'activité sur Clermont-Ferrand.
Une fois l'arcus passé, je traverse l'Allier pour me mettre de l'autre côté d'Ebreuil pour observer l'évacuation de l'orage et ses nombreux éclairs sous forme d'intra et inter-nuageux.
Je finis par m'endormir sur place. Le lendemain, au petit matin, changement d'ambiance. Je constate que les bas-fonds sont décorés par de jolis bancs de brouillards.
Caméra de sorti, je décide de filmer l'évolution du brouillard alors que je suis bien au chaud dans la voiture en train de télétravailler. A la mi-journée, une fois le travail terminé, je décide de trouver un fast-food afin de me toiletter. Je pars donc en direction de Vichy où je fais un point sur la situation du jour qui a l'air sympathique mais pas facile à gérer. En effet, les vents sont très favorables pour le développement d'orages prometteurs, mais certains scénarii tendent à assécher la masse d'air et par conséquent peu ou pas d'orages en vue avant la traversée du front froid. Cependant, je sens que la situation va être explosive dans l'après-midi avec de très belles cellules orageuses isolées en perspective.
Je tourne donc autour de Vichy à la mi-journée, tout en surveillant les images satellites et les premières convergences nuageuses qui se trouvent sur le relief du Massif-Central. Dans le milieu de l'après-midi, la première importante convergence se dessine.
Cette convergence remonte doucement vers le Nord. Je quitte Vichy pour me positionner en direction de Charlieu. Sur place, une première cellule orageuse s'initie à mon Sud-Ouest. Prenant initialement ma direction, une cassure de flux la fait complètement dévier vers l'Ouest. Il est trop tard pour se replacer et je ne peux observer que l'enclume de cette cellule orageuse qui aura donné à son passage des grêlons de 7 centimètres de diamètre.
Pensant que tout était perdu, et que j'allais rentrer plus tôt qu'envisagé, j'observe plus à l'Ouest que d'autres orages s'initient vers Clermont-Ferrand. L'espoir remonte et afin d'anticiper les cassures de flux de l'autre cellule orageuse, je descends en direction de Roanne. Cette seconde cellule orageuse gagne en puissance et évolue sans difficulté en supercellule. Je suis très bien placé pour l'attendre. Evidemment, la supercellule a dévié pour prendre, comme la première, une direction quasi-Ouest.
La supercellule tangente le Livardois-Forez par le Nord et la base devient nettement visible. Elle est très impressionnante, avec un mésocyclone et une tourelle convective bien définis.
Par moments, le nuage-mur sous la base mésocyclonique touche le sol.
Cependant, en glissant sur la plaine du Forez, avec l'advection sèche due au foehn venant du Sud, le nuage-mur tend à remonter, mais la structure mésocyclonique reste toutefois impressionnante et j'en profite pour faire quelques compositions photographiques. Des vaches m'ont même rendu visite et ont fait la pose.
L'orage est alors au summum de son activité et j'entends de bons bombardements d'extranuageux à mon dos. Des amorces de tubas très brefs ont été observés mais en raison de l'air sec à l'étage moyen, impossible que l'entonnoir ait un quelconque contact avec le sol.
Un gros rideau de grêle tombe sous la base mésocyclonique, ce qui démontre la puissance de cet orage.
La base orageuse s'organise en un empilement d'assiettes striées, tout en s'approchant dangereusement de ma position.
Je suis maintenant sous la base mésocyclonique. Un mur de grêle se trouve en face de ma position. Bizarrement à l'arrière, on peut apercevoir une poussée d'air sec, ce qui permet une nouvelle convection... Mais pour le moment, je laisse passer l'orage et pour mon kiff personnel, je tente de rentrer sous les précipitations. Mais une fois dessous, au vue de la taille des grêlons, et suite à un premier impact sur la carrosserie, j'ai rapidement fait demi-tour. Les grêlons étaient géants. Une fois l'orage passé, j'observe le radar de précipitation et je constate que les supercellules se suivent les unes derrière les autres.
Je retourne sur Charlieu, où l'orage a laissé derrière lui de gros grêlons. Je fais une pause de 5 minutes là-bas afin de ramasser quelques spécimens qui, 30 minutes après le passage de la supercellule, avaient pour certains, un diamètre atteignant 4 cm. A mon Nord, j'observe une base orageuse. Une petite supercellule s'était formée.
Ce qui est drôle, c'est qu'à l'arrière de cette supercellule LP, je peux observer une nouvelle base mésoclynonique au loin. Il s'agit de la quatrième supercellule de la série. La chasse du jour est devenue très simple. Il suffit de remonter d'une petite quinzaine de kilomètres vers le Nord après le passage de chaque cellule, pour les intercepter. Les suivre ne sert à rien car elles vont trop vite.
Pour la quatrième supercellule, je m'arrête près de Iguerande.
Dégagée de la crasse nuageuse, la tourelle convective est très visible, et la supercellule LP présente un bien imposant nuage-mur.
Au sec, je profite à merveille de l'observation de cette nouvelle majestueuse supercellule.
Son nuage-mur est très épais et quelques rotations sont visibles dessous. Son passage est rapide et une nouvelle supercellule, la cinquième, est en train se s'approcher, plus au Nord-Ouest. J'effectue une ultime image du passage du quatrième orage avant de prendre la route vers le Charolais.
C'est parti, je prends la route. La nuit tombe mais la route se mélange avec le vert des chutes de branches d'arbres et le blanc des grêlons tombés au passage de cet orage. Je me positionne ensuite entre Saint-Yan et Digoin pour intercepter la cinquième supercellule.
Arrivé en avance, je constate que l'activité électrique est drôlement intense. En observant la base mésocyclonique, un impact de foudre extranuageux tombe derrière mon dos. Surpris, je me prends de tremblements. L'orage est alors très intense et je décide, avec la tombée de la nuit, de faire des poses longues avec mon appareil photo (photos d'une à deux secondes en raison de la lumière qui est encore bien présente).
Un impact extranuageux tombe pile en face. Je réussis à le capturer mais le résultat n'est pas très satisfaisant. En effet, la mise au point est mauvaise et mon image est floue.
Sur ma faim, je me dis que cet impact était le dernier de l'épisode. Je continue tout de même à shooter, même si l'espoir d'un nouvel extranuageux, qui plus est, en face de l'appareil s'amenuise. Puis d'un coup. PAM! Un impact de foudre bifide tombe à quelques centaine de mètres de ma position.
Je suis désormais refait. La mise au point est parfaite, l'impact est ramifié et tombe pile en face du mésocyclone. Cette soirée est absolument incroyable. C'était le dernier de la série et la supercellule finit par faiblir en passant par mon Nord.
Une ultime cellule orageuse, très grêligène et qui a provoqué de lourds dégâts du côté de Vichy, en liaison avec le front froid s'approche. Alors que je redescends au niveau d'Iguerande, cet orage s'organise en une structure linéaire et dont l'activité électrique se manifeste sous forme d'incessants internuageux. La fin de la chasse s'approche.
L'orage prend un cap Nord-Nord-Est. Il est temps pour moi de rentrer, après une série de chasses avec beaucoup d'images dans la tête.
Comentários